25/03/2016
Infolettre de Philippe Dominati
Retoqué Cinq semaines après son vote à l’Assemblée nationale, le projet de révision constitutionnelle sur l’état d’urgence et la déchéance de nationalité a été soumis à l’examen du Sénat. En réaction aux attentats du 13 novembre, François Hollande a proposé au Parlement de modifier notre loi fondamentale afin d’y inscrire l’état d’urgence et la déchéance de la nationalité française pour les terroristes. Voici maintenant quatre mois que ce projet de révision occupe l’espace médiatique. Ce sujet semble pourtant lasser bon nombre de Français, car leur bon sens les pousse à croire que les réponses à la menace terroriste sont ailleurs. Ils comprennent que ce Président au bilan si peu reluisant s’agite pour constituer autour de lui l’union nationale. Un bricolage superflu de la Constitution Certains perçoivent plus la manœuvre que le fond. D’autres nous interrogent sur l’utilité réelle qu’il y aurait à modifier la Constitution. Pour ma part, j’ai pu vérifier à l’occasion de ces longues heures de débat que les procédures d’état d’urgence et de déchéance de nationalité demeurent déjà inscrites dans le corpus législatif de la République. En conséquence, il n’est pas utile de changer la Constitution pour pouvoir appliquer ces deux mesures. C’est déjà la cinquième révision de la Constitution qui m’est proposée en tant que parlementaire par un Président de la République. Or, je reste marqué par mon opposition à la révision de la Constitution voulue par le Président Jacques Chirac pour y introduire le principe de précaution. De mémoire, nous n’étions qu’une petite vingtaine de parlementaires à rejeter cette idée. Et je constate aujourd’hui, aussi bien à droite qu’à gauche, que nombreux sont ceux qui regrettent cette modification. Je rappelle ce fait pour exprimer ma réticence naturelle à toute révision hâtive et émotionnelle de la Constitution. Une majorité disloquée La véritable surprise politique de cette manuvre présidentielle, c’est qu’elle a disloqué sa majorité parlementaire. Pour masquer cette déchirure, le gouvernement a donc dû modifier profondément, à l’Assemblée nationale, le projet présenté par le président de la République au Congrès de Versailles. Chancelant, quelques jours seulement avant de subir une nouvelle fronde avec la loi El Khomri, le pouvoir socialiste n’envisage plus de modifier réellement la Constitution. Il ne cherche qu’à arrêter le processus constitutionnel, en faisant supporter à la droite l’échec de cette révision symbolique. C’est la tonalité du discours du Premier ministre pour souhaiter un vote axé uniquement sur le texte voulu par le groupe socialiste de l’Assemblée nationale. C’est pour cette raison que les sénateurs Républicains et centristes ont suivi le président du Sénat pour laisser une chance au processus en cours, en renvoyant à l’Assemblée nationale un texte préservant l’essentiel. Il appartient désormais à la majorité socialiste de se soumettre à un consensus national ou de renoncer à modifier la Constitution. Par mon vote, j’ai voulu avec mes collègues faire preuve de discipline, afin d’obliger le gouvernement à prendre ses responsabilités. Mais ce texte n'a été adopté que par 176 voix pour, 161 contre et 11 abstentions, bien loin de la majorité des trois cinquièmes nécessaire. Par conséquent, cette révision constitutionnelle, de nature politicienne, est d'ores et déjà retoquée.
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